vendredi 4 décembre 2015

Discours de Poutine : “ Erdogan ne va pas s’en tirer comme ça : nous savons quoi faire…”

Poutine a donc prononcé son discours annuel hier (Source) "Chaque pays civilisé doit contribuer à la lutte contre le terrorisme, réaffirmant leur solidarité, non pas en paroles, mais en actes. Cela signifie que les terroristes ne doivent pouvoir trouver refuge nulle part. Il ne doit pas y avoir deux poids deux mesures. Aucun contact avec des organisations terroristes. Aucune tentative de les utiliser pour des buts égoïstes. Aucune entreprise criminelle avec des terroristes." Vladimir Poutine.
Nous savons qui se remplit les poches en Turquie et qui laisse les terroristes prospérer de la vente du pétrole qu’ils ont volé en Syrie. Les terroristes utilisent ces revenus afin de recruter des mercenaires, acheter des armes et planifier des attaques terroristes inhumaines contre des citoyens russes et contre les habitants en France, au Liban, au Mali et dans d’autres pays. Nous nous souvenons que les militants qui opéraient dans le Caucase du Nord dans les années 1990 et 2000 ont trouvé refuge et ont reçu une aide morale et matérielle en Turquie. Nous les trouvons toujours là.
Pendant ce temps, le peuple turc est gentil, travailleur et talentueux. Nous avons beaucoup d’amis bons et fiables en Turquie. Permettez-moi de souligner qu’ils doivent savoir que nous ne les assimilons pas à la partie de l’élite dirigeante actuelle qui est directement responsable de la mort de nos militaires en Syrie.
Nous ne pourrons jamais oublier leur collusion avec les terroristes. Nous avons toujours considéré comme une trahison de la pire et de la plus honteuse espèce d’agir ainsi, et cela ne changera jamais. Je voudrais qu’ils se souviennent de ceci – de ceux en Turquie qui ont tiré sur nos pilotes dans le dos, ces hypocrites qui ont tenté de justifier leurs actions et de protéger les terroristes.
Je ne comprends même pas pourquoi ils l’ont fait. Toutes les questions qu’ils pourraient avoir, les problèmes, les désaccords que ne nous connaitrions même pas, tous auraient pu être réglés d’une manière différente. De plus, nous étions prêts à coopérer avec la Turquie sur toutes les questions les plus sensibles qu’elle avait ; nous étions prêts à aller plus loin, là où ses alliés ont refusé d’aller. Allah seul sait, je suppose, pourquoi ils l’ont fait. Et sans doute, Allah a décidé de punir la clique au pouvoir en Turquie en s’emparant de leur esprit et de leur raison.
Mais, s’ils s’attendaient à une réaction nerveuse ou hystérique de notre part, s’ils voulaient nous voir devenir un danger pour nous-mêmes autant que pour le Monde, ils ne l’obtiendront pas. Ils ne recevront aucune réponse pour le spectacle ou même pour un gain politique immédiat. Ils ne l’obtiendront pas.
Nos actions seront toujours guidées principalement par la responsabilité – envers nous-mêmes, envers notre pays, envers notre peuple. On ne va pas jouer les gros bras. Mais, s’ils pensent qu’ils peuvent commettre un crime de guerre odieux, tuer nos concitoyens et s’en trier comme ça, en ne souffrant de rien de plus qu’une interdiction des importations de tomates, ou quelques restrictions dans la construction ou d’autres industries, ils délirent. Nous allons leur rappeler ce qu’ils ont fait, plus d’une fois. Ils vont le regretter. Nous savons ce qu’il faut faire.”  (Source)

Analyste US: la Turquie a gros à perdre dans son conflit avec la Russie

Selon lui, les échanges commerciaux sont estimés à 30 milliards de dollars, et s'ils sont importants pour la Russie, ils sont vitaux pour la Turquie.
Dans la guerre commerciale provoquée par Recep Tayyip Erdogan et qui l’oppose à Vladimir Poutine, il n'y aura qu'un seul vainqueur, la Russie, estime l'analyste du site américain d'information financière MarketWatch , Amotz Asa-El.
Selon lui, les échanges commerciaux sont estimés à 30 milliards de dollars, et s'ils sont importants pour la Russie, ils sont vitaux pour la Turquie.
Notamment, suite aux sanctions occidentales contre la Russie, cette dernière achetait à la Turquie des fruits et légumes pour environ quatre milliards de dollars. Toutefois, Moscou est capable de trouver sans difficulté des fournisseurs alternatifs dans des pays au climat chaud, tout comme des importateurs pour son blé.

Selon l'analyste, passer leurs vacances en Turquie n'est pas une priorité absolue pour les Russes, quoique l'année passée ce pays ait accueilli 3,3 millions de touristes russes. Pour Ankara, la perte risque d'être plus grave, les Russes représentant un dixième du nombre total de touristes.
"Les fermiers privés de possibilité d'écouler leur récolte sur le marché russe, les employés de restaurants et d'hôtels qui perdront bientôt leurs clients russes, rejoindront les Turcs qui s'opposent déjà à plus l’afflux d'un million de réfugiés syriens ayant inondé le marché de la main d'œuvre en Turquie", indique l'analyste.
Si la Russie refuse de livrer son gaz, la situation en Turquie sera très grave. Moscou subira des pertes financières importantes, mais elle peut se le permettre, alors que l'économie turque sera pratiquement mise à l'arrêt.

La Turquie en voie d'isolement sur le plan diplomatique

Se montrant complaisante à l'égard du groupe djihadiste Etat islamique (EI, Daech), la Turquie est entrée dans une confrontation indirecte avec la Russie qui soutient le président syrien Bachar el-Assad, constate un journaliste du Huffington Post.
Ankara a commis plusieurs erreurs, ce qui lui a valu un conflit avec la Russie, estime Romain Herreros, journaliste du Huffington Post
"Ankara a réussi le double exploit d'entrer en crise avec Moscou tout en irritant les chancelleries occidentales, autant agacées par la position ambiguë de la Turquie à l'égard de l'organisation djihadiste que par la lutte menée par le pouvoir turc contre les Kurdes, sur lesquels la France —entre autres- compte pour battre Daech", écrit M.Herreros.

L'auteur signale la complaisance d'Ankara à l'égard de Daech, en rappelant notamment que le président turc Recep Tayyip Erdogan a longtemps refusé de qualifier de "terroristes" les membres de cette organisation. Pourtant, cela n'a pas empêché la Turquie d'être ciblée par les djihadistes sur son propre territoire.
"Accusée sans détour par la Russie de participer activement au trafic de pétrole organisé par Daech, la Turquie se retrouve prise à son propre piège", souligne M.Herreros, en évoquant un contrôle tout relatif que la Turquie exerce sur sa frontière avec la Syrie par laquelle combattants étrangers et armes circulent sans trop de difficultés. 
La conférence de presse du ministère de la Défense russe, Moscou, Dec. 2, 2015.

Selon le journaliste, la Turquie voyait d'un bon œil l'émergence de l'Etat islamique, parce que ce groupe menaçait à la fois Bachar el-Assad et les combattants kurdes.
"Le président turc tentait via l'EI de précipiter le départ de Bachar el-Assad afin de permettre l'instauration d'un régime sunnite de l'autre côté de sa frontière", relève M.Herreros.
Le journaliste estime que le fait d'abattre un avion militaire russe illustre cet entêtement dans lequel s'est enfermé la Turquie.
"Car même si Erdogan peut revendiquer la souveraineté de son espace aérien, il ne pouvait ignorer les effets de l'incident à sa frontière (…) Comme résultat, la Turquie est rentrée dans une logique de confrontation avec Moscou, dont elle voit les résultats aujourd'hui. Les amis de mes ennemis sont mes ennemis", a-t-il indiqué.
M.Herreros en vient à la conclusion selon laquelle l'erreur d'Ankara à court terme est d'avoir fragilisé les espoirs d'un front commun contre Daech au moment où Obama et Poutine se rapprochent d'un accord, et à long terme, la Turquie ne pourra plus être considérée comme ayant un rôle de stabilisateur dans la région dans la mesure où elle a largement contribué à "la création d'un monstre".